Je suis un moineau (Cristobalina)
Mon quotidien de moineau en ville, une matinée comme toutes les autres, aujourd’hui il fait beau et pas très chaud. D’une envolée, je me pose sur le panneau d’horaires du tram, j’aime être perché, à semi-caché j’ai une belle vue et je suis protégé.
J’observe les passants, le va-et-vient, j’ai appris très tôt à ne pas avoir peur du bruit, à me faufiler entre les gens, je me suis adapté et me nourris avec ce que les humains mangent. Je trouve toujours car ils se nourrissent tout le temps et laissent tomber des bouts ou jettent dans les poubelles.
Parfois je reste la perché à observer pour le plaisir, cette ville est très belle, je me sens bien, je traine vers le lac et profite de sa fraîcheur. Je regrette seulement qu’il n’y ait pas assez de points d’eau.
Mais bon, la vie de moineau de ville n’est pas très compliquée si je compare à celle de colombe, toujours à sautiller entre les pieds de passants en faisant attention à ne pas se faire piétiner. À s’envoler avant que les enfants les rattrapent, les humains, j’ai remarqué, n’aiment pas trop les colombes alors que les moineaux c’est différent, c’est mignon, petit. À force on est devenus effrontés, on s’invite aux tables de terrasses, on réclame des miettes, même en bandes ça nous rassure.
Je disais que j’étais planté dans ce perchoir et j’ai senti sa présence appuyée contre le poteau, cette femme me regardait depuis un moment déjà. Elle souriait, ma présence devait lui faire du bien, maintenant je l’observe aussi du coin de l’œil. Je pense que peut-être me regarder lui fait sentir qu’elle s’évade de son monde à elle. Je ne risque rien, si haut perché, je savoure aussi ce moment rien qu’à nous deux.
Que peut ressentir un humain quand il prend acte de notre présence, nous qui sommes la plupart du temps invisibles. Le tram arrive, elle disparaît. Aujourd'hui j’ai vécu un moment suspendu, une rencontre, je retourne à ma vie de moineau.
Cristobalina