La mort n'existe pa


La mort n'existe pas


“Nous parlons du chaud et nous parlons du froid,

nous parlons du sucré et nous parlons du salé.

En réalité, il n’y a que du vide et de l’atome.”

Auteur inconnu


La mort n’existe pas. Pas évident à dire, et encore moins à écrire.

Et pourtant, à bien y réfléchir, on peut pas définir, peindre, dessiner la mort.

La mort n’existe pas. Les morts oui. On estime à 90 milliards le nombre

d’humains ayant utilisé cette planète.

90 milliards, mais au fait, vous savez c’est quoi un milliard ? Oui, vous savez

que c’est un 1 suivi de 9 zéros. Parfait, mais qui sait combien de temps il

faudrait pour compter jusqu’à un milliard ?

Je vous laisse faire le calcul, les calculatrices des smartphones le

permettent.

Bon, vous avez trouvé genre 31,7 ans ? Ce qui veut dire que si vous avez 64

ans, vous auriez pu compter 2 fois, jour et nuit. Bref, on va avoir besoin de

cette notion pour éclairer la suite.

Au passage, le moindre disque dur actuel contient un téraoctet, soit

1 000 milliards d’informations. 1’000 fois 32 ans pour les compter !

Vertigineux non ?

Et l’Univers connu qui mesure 13,7 milliards d’années-lumière de chacune

9’460 milliards de km. Argh, ça donne le tournis.

Revenons à nos moutons, et plutôt que de considérer “qui je suis ?”

regardons pour une fois “ce que je suis”.

Oui, chercher à savoir “qui je suis ?” va mener à des classifications qui

rassurent les grand singes que nous sommes dans leur désir

d’appartenance.

J’en cite quelques-unes pour rappel. Je suis Lion ascendant Cervin,

Jurassien d’origine Corse, dans un hameau de la Gruyère du milieu,

cultivateur de bons mots, juif-protestant, Bac +5, sculpteur sur pierre ollaire,

et d’après la nomenclature de Meyers-Briggs : ENTP. Cette manie de vouloir

nous faire entrer dans des cases... Navrant.


Concernant le corps, on va pas chipoter, mettons que je pèse 100 kgs.

D’abord, je suis constitué de 70% d’eau. De là à se rendre compte que ces

70% d’eau sont constitués... de gaz. Ça donne une autre image.

Ensuite 99% de mon corps est fabriqué à partir de seulement 6 éléments !

Oxygène, hydrogène, calcium, azote, carbone et phosphore.

La mort est donc un changement d’état, je bougeais, je bouge plus. Je

pensais, je pense plus. Je respirais, je respire plus.

Si je reprends les composants que je restitue à la Terre, donc à l’Univers, il

faut bien admettre qu’ils étaient là avant moi.

Par conséquent, ces mêmes éléments seront encore là après mon décès. Si

je choisis la crémation, l’eau aura tôt fait de remonter droit vers un nuage

pour aller arroser un village en Allemagne ou retomber en grêle sur des

vignes valaisanes.

Quant au reste, dispersé ou non et selon l’adage : “Rien ne se perd, rien ne

se crée, tout se transforme”, je vous laisse imaginer où il peut bien finir ou

atterrir.

Une étude a montré qu’un verre d’eau possède une chance sur deux de

contenir une molécule d’eau ayant appartenu à Jeanne d’Arc, le 30 mai

1431 ! Et ce, même si le verre est extrait de n’importe quelle partie du globe !

Le premier qui dit : “on est bien peu de chose” aura bien raison.

Je récapitule sur ce qui m’amena à penser que la mort n’existe pas.

1 - j’imaginais une transformation, une transition plutôt qu’une fin.

2 - les notions de chimie apprises à l’école aidaient à prendre un peu de

hauteur, à appréhender différemment.

Et si donc la mort n’existe pas, de quoi aurions-nous peur ?

Des religions cherchent non seulement à nous coller les chocottes, mais de

plus, elles nous engagent à posséder peu puisque nous serons dédommagés

au centuple dans un éventuel au-delà.

Point de vue marketing c’est top, ça et le réseau social ancestral de

remontée des infos, j’ai nommé la confession.


Je ne connais pas les religions ni leurs équivalents comme le Bouddhisme

ou autre, mais je pressens que voir la mort sous le prisme de ce que l’on sait

grâce à la science permet de “réunir” tous ces dogmes.

Le Bouddhisme et ses réincarnations successives ? Une molécule d’eau ou

un ou deux atomes de carbone de mon défunt voisin vont bien finir par se

retrouver, disons, dans la brindille d’un arbre ou dans un canard, ou

n’importe quoi, selon les vents, les marrées.

Ceux qui pensent que nos ancêtres sont parmi nous, bienvenue au club ! Ils

y sont, tout autour.

Ces 90 milliards de formes humaines nous ayant précédés, on marche

dessus, au sens premier du terme.

Aussi, se considérer unique, avoir la mémoire de soi comme une continuité

depuis notre naissance : pipeau.

Si j’en crois la science, notre corps entier serait renouvelé tous les 7 ans au

niveau des molécules. J’en suis donc à plus de 9 fois. Et tout en ayant

l’impression d’être toujours la même personne.

Et un corps humain (restez assis !) c’est 37’000 milliards de cellules.

Le koan “Quel était votre visage avant la naissance de vos parents” revêt un

certain sens une fois passée l’apparente impossibilité de la chose.

“Nous sommes tous frères” ? Évidemment, comment peut-il en être

autrement ?

Récemment, j’ai eu une vision fulgurante et surprenante en regardant la vie,

la ville, les gens dans la rue.

Tout était sable, de couleur jaune-ocre et chaud, avec un peu de couleur en

dégradé, du sable en l’air tenu comme par magie, prêt à retomber au sol.

Une fausse impression de cohésion de ces grains de sable. Finalement pas

faux comme vision puisque les pièces du puzzle qui nous compose sont des

éléments simples, les mêmes qui se promènent dans l’Univers.

“Tu es poussière et tu retourneras poussière”. Quand bien même Hubert

Reeves précise “oui, mais poussière d’étoiles”, la vision était juste...

En récapitulant, je me rends compte qu’on est né en même temps que

l’Univers, que nos prédécesseurs sont encore là et par conséquent, ce qui

composera nos enfants, nos descendants est déjà là.


Ça peut sembler vouloir être une théorie “unificatrice et réductrice”, mais je

trouve cette vision rassurante, touchante même.

Tout est là, tout le monde est là, sans vouloir faire de l’écologie, le grand

recyclage est sous nos yeux.

Par contre il y a deux ombres au tableau, et non des moindres. Des énigmes

non résolues encore. Qu’est ce qui fait que deux objets, exemple deux

cailloux placés n’importe où dans l’Univers, finiront pas se tamponner ?

Et aussi, d’où vient ce que la vie, dans son immense diversité actuelle est

apparue dans ce fatras d’atomes, de molécules ?

Là, mystère et boule de gomme. Et l’âme, où la caser dans le cas présent ?

Je n’ai pas d’idée, mais admettons qu’elle pèse bien ses 21 g, elle est

apparue à l’aube de nos 90 milliards de parents ?

Mais avec ce qui précède, j’ai déjà nettement moins peur de mourir, ou

plutôt de restituer mes ou les 37’000 milliards de molécules qu’on m’a

prêtées pour écrire ces 6’474 caractères.


Franck Vasseur

21 octobre 2021